Arrivée à Cape Town
29 Décembre 2015.Après une journée entière de voyage, transporté d’avion en avion, je quitte l’hiver français et rejoint Clément (alias Coco) et mon frère Jérémy (alias Gooby) dans la canicule sud-africaine pour une aventure folle de six semaines. Gratifié de trois jours de repos avant le grand départ, j’en profite pour m’acclimater. Nous sommes accueillis par David, notre hôte cycliste qui nous invite dans son appartement avec vue sur la baie de Cape Town. C’est ça la vie en vélo ? Super ! Mais j’ai vite déchantée… Les deux fous du guidon ne me ménagent pas et, à peine arrivée, je charge mes affaires sur mon nouveau bolide.
«N’amène pas trop d’habits parce que tu devras les porter » m’avait dit le grand Gooby. Mais que nenni bien sûr, je n’ai rien écouté et me retrouve avec une sacoche entière remplie d’affaires que je ne mettrais pas du séjour.
Nous sommes invités pour fêter la nouvelle année par David et sa compagne. La soirée est excellente et les énormes plats de viandes, bière et shooter sudaf sont amplement suffisants pour nous remplir la panse. A peine quelques heures de sommeil que nous partons pour une randonnée sur un des monts autour de Cape Town, Lions Head. Après une bonne heure d’ascension sous une chaleur écrasante, nous sommes récompensés par une vue superbe sur la métropole. Quelques kilomètres plus loin, nous profiterons dun bain frais dans un lac aux eaux obscures. La première journée de l’année est donc bien remplie, mais le départ du lendemain est déjà présent dans mon esprit.
Le grand départ
Samedi 2 janvier 2016, 6h du mat’. Ça y est, c’est l’heure du grand départ! J’enfile mes habits de cycliste, mon casque et enfourche mon vélo pour la première étape à 60Km. Nous longeons la côte en compagnie de David sur la première moitié de la journée. Il est encore tôt et nous sommes à l’ombre le long des falaises. Le soleil ne nous brûle donc pas encore la peau et le vent reste discret. C’est après que les choses vont se gâter. A l’horizon la première montée du séjour se dessine, évidemment en pleine cagnasse, et les premières difficultés se font ressentir. Nous poursuivons notre route jusqu’à Kleinmond où la température doit avoisiner les 40°C. Pique-niquant à l’ombre d’un arbre, je suis ravie de manger mon sandwich beurre de cacahuètes et carottes! A peine le temps de finir ma dernière bouchée que je sombre déjà dans une sieste qui sera écourtée par les ronflements de l’énergumène Coco.Nous passons la soirée chez Ferdie et sa famille et découvrons une nouvelle pratique de barbecue, le braïï, qui réjouira mes compatriotes. Car oui, la nourriture avec Attrape Ma Roue c’est sacrée. Tout de même 4 à 5 repas par jour ! Ce soir là, pas le temps de prendre un café que je tombe dans les bras de Morphée à 20h30.
Le long de l’océan indien
Les jours s’enchainent, il fait toujours aussi chaud et je réalise que l’Afrique du Sud n’est pas un pays plat, mais alors pas du tout. Nous allons néanmoins de rencontres en rencontres avec des gens tous aussi formidables et accueillants les uns que les autres, ce qui donne de le sourire et la force de continuer ce périple hallucinant. Nous pédalons dans des décors magnifiques à travers les collines et les vignobles.
Après une première soirée de camping agrémentée de vin blanc, pastèque et petit plouf dans la piscine de nos hôtes absents pour la soirée, nous partons à l’aube pour éviter la grosse chaleur qui avoisine les 40 degrés à l’ombre. Ce jour-là sera pour moi un des plus durs mais aussi un des plus beaux. Nous laissons Coco partir devant qui a en tête de faire 140 km pour aller voir le Cap Agulhas, le point le plus au sud du continent africain. Très peu pour moi, je reste avec mon frère, avançant plus tranquillement. Montant et descendant pendant des kilomètres et des kilomètres à travers les vignobles africains, les paysages sont magnifiques mais la journée me parait interminable. A ce moment, je comprend le côté parfois grognon de mon frère. On enchaine les collines sous la chaleur, je suis crevée et l’envie de jeter le vélo au milieu de la route, crier, râler, me passe plusieurs fois par la tête. Enfin, au bout de 50 km de chaleur et de montées incessantes, nous arrivons enfin à Napier où nous nous octroyons une pause boisson fraiche. « Il reste 15 Km. Est-ce-que tu veux continuer tout de suite ou préfères-tu qu’on se repose et repartir vers 16H quand il fera moins chaud ? » me dit Gooby. Je suis complètement carbo mais décide de continuer pour tout faire d’une traite et finir la journée d’ici 2h. A 7 Km de l’arrivée, une dame nous arrête sur le bord de la route. Elle nous annonce que notre comparse se trouve avec son mari au Cap Agulhas et nous propose de nous offrir un toit pour ce soir. Bien qu’il faille faire marche arrière, je suis aux anges car une bonne soirée nous attend avec un lit moelleux et un gros repas qui nous réjouit et nous redonne des forces. La soirée me permet également de me rendre compte que le défi sportif, que je pensais impossible, n’est finalement rien comparé aux rencontres merveilleuses que l’on fait lorsqu’on voyage à vélo. Durant les journées suivantes, nous faisons des « petites » journées de 60 à 70km, toujours dans les collines. Chaque soir, nous sommes hébergés chez des gens merveilleux.Finalement, nous connaissons une première journée de pluie. Par chance, nous trouvons refuge dans une ferme où le propriétaire, non comptant de nous offrir un abri, nous fournit de la viande pour faire un braii, des oeufs pour le petit déjeuner et du lait frais à la plus grande joie de notre compère Coco, qui en boit des litres et des litres à lui tout seul. Le jour suivant, la pluie n’ayant pas cessé, nous décidons de faire notre première journée de pause après 5 jours de vélo plutôt intense.
A l’aube de la sixième étape, où le kilométrage doit avoisiner les 90 km, ma plus grosse journée, je m’attends au pire. Nous commençons la journée par un chemin d’une dizaine de kilomètre qui ne cesse de monter et descendre qui s’avéra plus compliqué que ce je pensais. Après 8 bonnes heures de vélo nous arrivons à Albertinia. Je suis crevée. Nous tournons quelques temps dans la ville et trouvons finalement une place dans un jardin pour y poser le campement. Si fière d’avoir parcouru autant de kilomètres en vélo, mais tellement endolorie par la selle et épuisée par la chaleur, je m’endors à la fin de ma soupe de pâtes chinoises. Nous enchaînons les grosses journées, toujours plus chaudes et difficiles les unes que les autres, et nous posons enfin nos vélos pour une journée chez un couple de cycliste âgés de la soixantaine. J’attendais quand même cette pause de pied ferme et nous ne sommes pas à plaindre. Nous sommes reçus comme des rois, Peter et Colleen nous font découvrir Knysna de fond en comble et réjouissent également nos estomacs d’excellents plats sud-africains.Après cette belle journée de repos, nous remercions nos hôtes et reprenons la route. Nous essuyons de la pluie pendant les 30 premiers kilomètres mais cela ne dure pas et nous retrouvons vite le soleil cuisant pendant les jours suivants. Les paysages changent et nous passons des collines à des forêts verdoyantes remplies d’animaux. Nous rencontrons babouins, lézards et chenilles en tout genre, mais pas les éléphants qui paraît-il se cachent encore dans cette section sauvage. Après avoir roulé dans les champs et le long des fermes pendant deux jours, nous revenons sur la côte de l’Océan Indien, à Humansdorp. Nous profitons donc de la mer, certes pas très chaude, mais revigorante. J’améliore mes chandelles avec les deux barges du sport qui ne s’arrêtent jamais. Nous quittons Colchester en direction de Kenton-on-Sea, sur une étape plus compliquée que prévue. Après une heure de route plutôt fraiche, nous prenons le vent en pleine bobine pendant 60 kilomètres alors que mes mollets se déchirent sous les coups de pédales. Notre pause repas effectuée, un dilemme pour la fin de la journée vient se poser. Les deux zozos me proposent 27 Km par la route ou 47 Km par un chemin qui s’annonce magnifique, mais évidemment moins facile. Je décide de relever le défi, nous entamons donc ce passage caillouteux, la gnaque de parvenir à faire ma plus grosse étape. Les conseils que nous avions reçus sur ce chemin s’avèrent véridiques : on en prend vraiment pleins les mirettes, la vue est à couper le souffle. Mais le chemin devient vite un enfer pour moi et c’est de plus en plus compliqué d’avancer. En haut, en bas, du vent en pleine face, des cailloux, chaque coup de pédale devient difficile. Le crépuscule tombant, nous devons mettre la vitesse supérieure pour ne pas arriver en pleine nuit chez nos hôtes. Malgré la douleur ressentie dans toutes les parties de mon corps, la fraîche qui tombe, je continue coûte que coûte jusqu’à la ville et nous parvenons enfin à la maison de Shanna et Miguel.
Bilan de la journée : 106 kilomètres, 9h de vélo, les cuisses en feu, les fesses endolories mais aussi et pas des moindres, mon cap de 1000km enfin passé ! Un repas copieux nous est gentiment cuisiné par nos hôtes mais à peine fini que je m’endors déjà sur la table… Nous profitons d’une journée de repos bien méritée et nous repartons le lendemain pour deux jours de vélo en direction d’East London. De là, nous quittons la côte pour remonter vers Johannesbourg. Nous sommes accueillis chez Lise, où finalement nous prenons de nouveau une journée de repos. Encore une fois, nous aurons la chance de déguster un fameux braïï qui nous donnera des crampes au ventre tellement on sest jetés sur les plats.
A l’assault de la montagne
Les jours suivants, la montagne en pleine mire, ne s’annoncent pas de tout repos. Les choses se confirment rapidement, mes mollets souffrent dans les étapes pourtant plus courtes que d’ordinaire et j’essuie en prime des crevaisons. Avec Attrape Ma Roue, chacun doit s’occuper de sa monture et j’apprends donc à réparer mes pneux. Après quelques larmes de douleur que je cacherais sous mes lunettes, nous arrivons enfin à Queenstown. Nous y sommes hébergés par Alec et pendant la discussion nous apprenons que le bonhomme, non content de posséder le plus gros buffle du pays, a été finaliste dans l’émission « Boer soek ‘n Vrou », version sud-africaine de « Lamour est dans le pré ». Ce soir-là, nous sommes donc accueillis par une célébrité!! Après quelques bières, du Brandy et des morceaux de poulets, nous nous couchons sous une pluie battante. Si près des montagnes du Lesotho, la saison chaude apporte quotidiennement de forts orages en fin d’après-midi. Le lendemain nous prenons une route montagneuse, la plus jolie route du séjour. Pas de chance, nous prenons une grosse saucée juste avant de se réfugier dans une ferme pour la nuit. Mais le temps s’améliore et la chaleur revient à grands pas. Lorsque nous arrivons à Jamestown le lendemain, il fait presque 45°C. Nous passons une folle soirée chez « Mamie ». La vieille dame, qui nous héberge gentiment, nous fait picoler toute la soirée. De l’Amarula pour ma part, un alcool typique sud-africain sirupeux semblable au Bailey et extrait du marula, un fruit dont les éléphants raffolent. Pour les deux zozos, une bouteille de Whisky qui ne terminera pas la soirée. Je vous laisse imaginer la difficulté pour reprendre les vélos le lendemain sous le soleil de plomb. A Wepener, nous rencontrons Jochimus. Il nous propose de se reposer dans la maison pastorale inoccupée. Après huit jours de vélo consécutifs, l’occasion est trop belle et nous décidons de faire un arrêt pour deux jours. Nous participons avec joie à une partie de Rawball le lendemain. Le jeu ressemble fortement à la pétanque, se joue sur un terrain d’herbe rase avec des plus grosses boules, ovoïdes et surtout désaxées. Le lancer est donc plutôt technique, mais je prends vite la main et, je n’en suis pas peu fière, j’écrase mes compatriotes pour ma première participation. Nous passons en suivant un excellent moment à discuter avec l’équipe de Rawball de la ville tout en dégustant de nouveau un braii local. Le lendemain est un dimanche, le dernier jour de Janvier, et nous sommes invités à la messe par Jochimus. Curieux nous acceptons d’y participer. Le service est en afrikaans, j’ai donc plus admiré les vitraux que réellement écouté, mais l’expérience fut intéressante et enrichissante.Nous enchaînons les cinq derniers jours de route, passant par les montagnes et longeant le Lesotho jusqu’à Bethlehem. La chaleur est toujours très pesante et chaque jour je suis presque à bout de force. Mais je n’abandonne pas et je vais jusqu’au bout du défi lancé par mes deux compères. C’est une expérience qui vaut le coup d’être vécue.
Lors de mon dernier jour de vélo, je franchis enfin la barre tant attendue : 2000km. Nous traversons des paysages majestueux pour enfin arriver à Bethlehem, où nous sommes accueillis par Philippe et sa femme. Pour ma dernière soirée de » cycliste « , nos hôtes sont loin d’être une famille ordinaire. En effet, en franchissant le portail on peut déjà apercevoir quatre chiens, une biche et un springbok qui arrivent en sautillant depuis le jardin. Mais nous irons de découvertes en découvertes en entrant dans la maison, et nous comprenons vite pourquoi ils surnomment leur maison le » Zoo « . Ils ont plus de 60 animaux chez eux, allant du plus commun au plus bizarre. Chiens, singes, crapauds, serpents, tarentules… Après avoir fait le tour du propriétaire, nous profitons du bon repas concocté par le couple, et je pars me coucher, des étoiles dans les yeux, si fière d’avoir parcouru 2000km à vélo.Mode safari
Nouvelle partie du voyage, que j’attendais avec impatience, nous partons explorer la vraie savane, l’image que j’avais de l’Afrique avant d’arriver. Direction le Kruger National Park, une des plus grandes réserves animalières du continent africain, plus grande que la Belgique. Fini le vélo car ceux-ci ne sont pas permis dans le parc et donc, après une journée entière de voiture que nous avons louée pour l’occasion, nous arrivons l’aube suivante à l’entrée du Kruger. « Ne sortez pas de la voiture, n’ouvrez pas les fenêtres surtout » sont les recommandations des gardes. Mais comment fait-on quand on veut aller aux toilettes au milieu dun parc avec éléphants et lions cachés dans les buissons ? On sort, on se dépêche et on remonte vite fait dans la voiture à vrai dire.Le parc est magnifique et les animaux sont innombrables. On a tout vu : des lions, des éléphants, des gnous, des zèbres, des antilopes, des phacochères, une hyène, un rhinocéros et son petit mais aussi des hippopotames et des oiseaux en tout genres. A quelques jours de la fin de mon séjour sud-africain, je fais le bilan.
Je suis très fière d’avoir pu faire ce bout de chemin avec les deux zozos et d’avoir pu découvrir le pays des springboks en bicyclette. Ce voyage m’a beaucoup appris. Faire du vélo peut paraitre facile mais on se trompe. Il fait chaud, c’est lourd, c’est dur, c’est long… Mais les nombreuses douleurs au derrière, aux cuisses, au dos ne sont rien en comparaison de la beauté des paysages traversés et des rencontres formidables avec un peuple vraiment très accueillant.
Simoun on mai 30, 2016 at 1:51 said:
Et bien ! pas froid aux yeux la sœurette !!
Félicitations à vous 3, au plaisir de vous lire, encore et encore…