Il nous aura fallu trois mois. Trois mois pour traverser cet immense morceau de terre au milieu de l’océan. Trois mois, six mille kilomètres ajoutés au compteur, du soleil, du vent, des plages et beaucoup de bush. Trois mois pour reprendre la plume. Trop de mots se bousculent, trop d’images et de souvenirs nous reviennent, trop de choses à raconter. Encore une fois, les expériences vécues dans cette contrée sont à nulles autres comparables. Une faune unique, des paysages à couper le souffle, une flore singulière, des rencontres inoubliables, un accent inimitable, des frayeurs, des fous-rires et beaucoup de bonheur.
Tâchons donc d’organiser tout ça et commençons par le début. Revivez avec nous à travers ces quelques lignes notre route au pays des kangourous, du Footy et de la Vegemite.
Une première journée chargée en émotion
28 Janvier 2014, 19h47, Kuala Lumpur. Nous sommes en transit dans la capitale malaysienne. Ce premier avion depuis notre départ restera un souvenir aussi marquant que certaines de nos escapades, notamment la ballade dans l’aérogare au départ de Bangkok… On ne peut pas dire que l’on soit passé inaperçu affublés de nos grandes gueules, de nos barbes, de toutes nos sacoches et des deux gigantesques cartons contenant nos vélos. A travers le tumulte, la cartouche de gaz du réchaud est passée incognito… directe dans la soute… Bravo !
Bref… nous sommes là, assis face à face, entourés par une foule de voyageurs d’horizon divers, quand, au loin, nous apercevons un autre barbu dont la tête nous est familière. Le poilu nous fait des grands signes, le sourire jusqu’aux oreilles. Nos zygomatiques s’élargissent. Pierre nous a quitté il y a seulement quelques heures que déjà un nouveau compagnon se joint à l’aventure. Thomas, le frère de Jérémy, alias Tom ou P’tit Goubi, est tout sourire. Un an que nous n’avons pas aperçu sa bobine. Nous accourons et nous voilà en pleines effusions à grand renfort d’accolades dans le hall de l’aéroport. On se raconte les derniers ragots bordelais et ça chambre sec alors même que nous montons dans l’avion qui nous emmène au pays des kangourous.
Quelques heures plus tard nous débarquons à Perth, capitale de l’Australie Occidentale. A peine les contrôles de douanes passés, que déjà Thomas se mets dans le bain du voyage : une pédale en vrac, l’axe de la roue arrière cassé avec en prime une effusion, de sang cette fois-ci, suite à une utilisation hasardeuse du couteau… Et pas encore sur la bicyclette, splendide !!Le temps de trouver un magasin de vélo et nous glissons enfin tout les trois sur l’asphalte australien. Alors que nous longeons la mer réchauffée par un soleil en pleine forme, les premiers maillots de bains, dignes des meilleures plages de Malibu, sont aperçus. L’envie de bomber le torse et de montrer notre beau bronzage de cycliste est presque trop fort. Presque…
Nous rejoignons Cottesloe, petite ville péri-urbaine au sud de la métropole. Nous avons rendez-vous avec Mika et Brice, qui habitent à 150m de la plage. Ce dernier est l’ancien colocataire de Gooby durant ses études à Montréal. Presque 10 ans qu’ils ne sont pas vus les bonhommes. Nouvelles effusions lorsque les deux amis se racontent le chemin parcouru tandis que Tom et Coco prennent quartier dans la cahute sympathique.
Une préparation minutieuse
Nous profitons de nos premières journées pour, entre deux baignades, se concerter et concevoir notre aventure sur le colossal ilôt.
Coté trajet, Coco trouvait que 4500 Km en trois mois, c’était de la fainéantise. Alors plutôt que de rouler au plus droit pour Sydney, nous décidons finalement de prendre l’itinéraire « touristique », qui nous rajoute la mignonne bagatelle de 1500 Km.
Nous roulerons d’abord dans le sud-ouest de l’Australie Occidentale en suivant la côte. Plage, forêt et quelques collines au programme.
Suivra ensuite la partie technique : 2500 Km de bush entre Albany et Adélaïde, dont la moitié dans un sympathique et aride No Man’s Land nommé Nullarbor.
Puis nous longerons la côte entre Adélaïde et Melbourne pour passer sur la Great Ocean Road, magnifique littoral alternant plages et falaises.
Au final nous rejoindrons notre destination, toujours en suivant le rivage, à travers les contreforts des montagnes du sud-est du pays.
Coté sécurité, nous sommes prévenus par les locaux. L’Australie est un pays où de nombreuses espèces animales dangereuses se côtoient. Sept des dix serpents les plus venimeux y ont élu domicile. Lorsque nous nous enfoncerons dans les broussailles, attention à ne pas déranger le célèbre et agressif Tiger Snake. Précautions également à prendre le matin : bien secouer ses chaussures avant de les enfiler. Il serait ennuyeux de se faire mordre par une Red Back, ou une autre de ces arachnides peu sympathiques. Sur la route, le traffic devrait être sûr, mis à part l’aspiration provoquée par les Road Trains, ces gigantesques camions de 40m de long, trois ou quatre remorques pour un poids pouvant atteindre les 100 tonnes.
Un beau programme. Fort heureusement, nous n’auront pas affaire aux gigantesques crocodiles marins, qui restent cantonnés dans les climats tropicaux du nord de l’île !
La plage, la forêt et le Munda Biddi Trail
Après cet agréable repos, un rasage de barbes décidément trop longues, de belles sessions plages et un grand merci à nos deux amis qui nous ont accueillis le coeur sur la main, nous sommes fin prêt pour affronter les routes sans fin de la contrée.Nous longeons la côte pendant quelques jours. Thomas, qui était si inquiet de ses premiers kilomètres, est tout à son aise et s’en donne à coeur joie sur les longues pistes que nous empruntons. Il faut dire que les conditions sont idéales : grand soleil, léger vent rafraîchissant, la plage toujours à proximité. Attention tout de même à ne pas trop en abuser pendant l’effort : le sel, ça irrite et l’épiderme du postérieur peut rapidement en pâtir !! Nous roulons de l’aube à l’heure du déjeuner, profitant de la fraîcheur de la matinée pour pédaler et des chaudes températures de l’après-midi pour lézarder à l’ombre près du sable. Un premier arrêt chez Garry et sa famille nous permet d’explorer quelques chemins pédestres ainsi que de découvrir l’animal emblématique du pays. Des dizaines de familles de marsupiaux gambadent à la tombée de la nuit dans le bush qui entoure la maison de notre hôte. Ce dernier nous explique leurs habitudes, le fléau que l’animal représente pour les fermiers avant de nous servir une spécialité du coin : un kangourou-burger bien garni. Un vrai délice 🙂
Nous roulons et découvrons de gigantesques forêts d’Eucalyptus. Les rayons de lumière, s’enfonçant à travers les frondaisons, produisent d’extraordinaires reflets de verts. Le cri du kookabura (à écouter absolument : Lien) nous immerge encore plus dans l’ambiance. Chaque soir, avant de dîner, lorsque nous plantons la toile sur la côte nous avons le droit à des couchers de soleil majestueux. Tout se passe pour le mieux et même les quelques Tiger Snake que nous croisons fuient devant notre bonne humeur.C’est alors que nous optons pour le Munda Biddi Trail. La longue piste pour vélo relie Perth à Albany. Le chemin est magnifique, mais pas adapté, mais alors pas du tout, pour des cyclo-touristes avec 30 Kg de bagages. Résultat : après 5h de pédalage acharné, des passages sableux, quelques portés et une chute de Gooby, juste avant d’arriver dans un abri à la vue splendide, Coco explose littéralement le crochet de son dérailleur. Ce dernier pend, amoché, la mort dans l’âme, tandis que le casque du Clément en rage s’envole direction l’arbre le plus proche… C’est la merde!
Le lendemain nous repartons, Clément en autostop, direction Manjimup, le village suivant. Il y a un magasin de vélo…ouf! Mais, après plusieurs recherches, nous nous rendons compte qu’aucun fournisseur dans le pays ne possède la pièce adéquate. Encore une fois, les ennuis matériels affectent profondément le mental de l’équipe : Coco est bloqué, pas de solution satisfaisante en vue, un calendrier tendu, une plaine aride à traverser… Bref pas facile !! Après avoir écartés quelques hypothèses, dont un retour à Perth pour dégôter un nouveau cadre ou un utopique montage en fixie pour terminer le pays, nous choisissons finalement de commander un ersatz pour le crochet et d’acheter un nouveau dérailleur.
« On se retrouve plus loin »
Le timing étant serré, les deux frangins reprennent la route tandis que Clément reste pour recevoir la pièce et rejoindra ensuite les deux autres en stop. C’est la première séparation de la troupe, qui est pour le moins anxieuse et impatiente d’en finir avec cet épisode « problèmes techniques ».
Jérémy et Thomas pédalent, toujours dans la forêt, parfois subjugués par la hauteur et l’épaisseur des arbres, parfois harassés par les nuages de taons qui pullulent. Un matin, juste après l’aube, ils s’arrêtent devant un immense eucalyptus. Des barres de métal fichées tout les cinquante centimètres s’enroulent autour du tronc. A coté un panneau indique : « Montée à vos risques et périls. Hauteur 52 mètres. ». Il s’agit d’un des quelques arbres géants anciennement utilisés pour surveiller les départs de feu et aujourd’hui ouvert aux touristes. Un regard d’acquiescement et les deux compères se lancent vaillamment dans l’ascension. A peine dix mètres plus haut, Gooby nous fait un blocage :» Plus d’un an que j’ai pas foutu les pieds plus haut que ma selle, et la hauteur ça n’a jamais été mon truc. Là, la sécurité était pour le moins légère et… Bon bref, je vais pas chercher d’excuse, j’étais pas serein voilà tout 😉 »
Thomas rigole un bon coup, le pousse au cul et ils accèdent au premier palier à 25m. Nouveau panneau : « That was the easy bit ! ». Nouveau gémissement de Gooby… La fin de la montée s’enchaîne quasi à la verticale. Atteignant la plateforme supérieure, les deux apprentis cascadeurs contemplent, éclairés par les premiers rayons du soleil, le paysage magnifique et dégagé sur des lieux à la ronde. Ils sont ravis. Gooby :
» Oui, enfin bon, maintenant faut redescendre… »
Ils finissent par rallier la côte sud. Avec les belles plages Elephant Rocks et Green Pool, ils en oublient presque les soucis matériels de leur collègue. Quand les deux cyclistes arrivent enfin à Albany, ils sont confiants et déterminés, persuadés que la guigne a fini par les lâcher. Accueillis par Anne-Marie et David, ils se reposent dans leur superbe cottage, attendant leur infortuné compagnon.
Durant cette semaine, Clément s’occupe tant bien que mal dans la petite bourgade de campagne. Il alterne session lecture, séances « pompes abdos gainages » et jogging autour du stade de Footy derrière lequel sa tente est montée. Sportif jusqu’au bout des ongles !!
« Premièrement, trouver un spot à l’abri des regards où monter la tente, le camping sauvage étant interdit…rien de tel que l’étendue de bush cachée derrière le complexe sportif des lions de Manjimup dans laquelle nous avons pu observer la veille le dangereux, l’agressif, le fatal tiger snake !
Ensuite, s’occuper, sans se laisser démoraliser par la casse occasionnée sur la bécane…un peu de sport quotidien sur le terrain des lions suivit de séances lecture et bien sûr, profiter d’être seul parce que le voyage à plusieurs c’est bien mais souffler de temps en temps c’est pas mal aussi !
J’ai même eut la chance d’assister à un match de cricket…intéressant !! une bonne demi-heure pour comprendre les règles les plus basiques et s’apercevoir qu’il ne se passe pas grand chose…bref,et si on allait courir!! »
Enfin, la pièce lui parvient et, après un montage ardu, c’est avec satisfaction et soulagement qu’il rejoint la bande deux jours après :
« Le plan initial était de rejoindre les deux zouaves en auto-stop, oui mais voilà, tendre le pouce au départ de Manjimup s’avère aussi efficace qu’au beau milieu de la Creuse. C’est bien simple, personne ne vient ici et personne n’en repart non plus. Ajouté à celà les nuages d’infâmes taons, je me résigne à chevaucher ma monture regonflée à bloc et m’élance pour une étape nocturne. C’est à 9h00 le lendemain matin que je rejoins les deux Gooby pile poil pour l’heure du petit-déj! »
Marathon en plaine aride
En repartant d’Albany, la végétation commence à changer. Moins dense, plus clairsemée. Les arbres rétrécissent et se transforment rapidement en gros buissons. Les villes s’espacent de plus en plus. Les collines s’aplatissent et le vent, venant de l’est, souffle en continu. Nous voilà dans le bush.
Durant les sept cent premiers kilomètres, nous roulons à travers ces paysages quasi-stériles, muets devant la férocité du milieu. Le soleil est de plomb et le vent assèche nos gosiers en permanence. Seule la flore la plus tenace survit dans cet environnement. Nous passons par Esperance, qui porte bien son nom, où nous apercevons la mer une dernière fois avant de nous enfoncer dans les terres arides qui nous amènent jusqu’à Norseman.C’est là, dans cette petite localité, que nous faisons nos dernières préparations. Coco se farcit un extra 15L d’eau sur son porte bagage, tandis que ses deux collègues se chargent à mort de nourriture. 1200 Km nous séparent de la prochaine ville. Entre les deux, un gigantesque pas grand chose : le Nullarbor. Du vent en pleine face, un soleil bien costaud, une station service tout les cent ou deux cent kilomètres, des Road Train, du bush et encore du bush. Une dernière douche et ce soir-là nous glissons plein d’appréhension dans nos duvets, sachant que les prochains jours risquent d’être ardus. Nous partons aux aurores, dans la fraîcheur matinale, endimanchés dans nos K-Way et des chaussettes passées sous nos sandales. Les premiers kilomètres sont bluffant : le soleil levant produit des couleurs magiques sur le bush qui s’étend à perte de vue devant nous. Mais rapidement, l’astre s’élèvent. Les températures montent. Nous nous protégeons tant bien que mal des rayons qui frappent fort et de la poussière qui colle sur notre peau en sueur. Coco, notre champion, fend la bise en tête. Ils coupent les autres du vent qui souffle inlassablement, asséchant nos silhouettes. Sur le coup des treize heures, les 110 bornes prévues sont abattues, nous prenons notre déjeuner sur une des petites aires qui bordent la route. A peine arrêtés, des légions de mouches se jettent sur nous, grouillant sur nos vêtements, tentant de détestables infiltrations dans les yeux et le nez. Nous avons à peine la force de les chasser. Nos corps sont fatigués, nos traits tirés et nos regards perdus dans nos pensées : « ça va être long ! » Nous passons sous la tente, posée sur un sol rugueux, et dormons pendant les chaleurs de l’après-midi, à l’abri du soleil et de l’infâme hexapode volant. Au crépuscule, le froid tombe rapidement et c’est avec célérité que nous enfournons notre menu du soir avant de retourner profondément dans les bras de Morphée.
Les journées s’enchaînent. Magnifiques mais usantes. Les points de ravitaillement sont peu fournis et nous sommes contraints de nous rationner… Néanmoins, nous arrivons à récupérer de l’eau dans les quelques Road House qui sont disséminées sur la route. Comble du bonheur, nous arrivons même à dégôter de temps à autre suffisamment de liquide pour se permettre de rapides douches.
La fatigue reste omniprésente. Tom :
D’un autre coté, les paysages sont tellement hallucinant que ces harassantes journées semblent un bien maigre tribut. Les levers et couchers de soleil sur l’aride étendue sont somptueux. Nous apercevons parfois un troupeau d’émeus qui gambadent dans la plaine. La côte rejoint parfois la route et de gigantesques et imposantes falaises nous offrent d’incomparables points de vue.» Un matin après une vingtaine de kilomètres, et la fringale déjà présente, voilà que le pneu de Jérémy nous fait une nouvelle fois des siennes. Pendant que l’énergumène ce met à la tache, tel un lanceur de disque (le disque étant la roue), Coco et moi nous nous reposions sous le seul arbuste des alentours. Au bout d’une petite demi heure, le vélo est prêt a repartir, et c’est au moment de me lever que des vertiges me prennent. J’ en fais part de suite à mes camarades, et Coco s’empresse de nous annoncer les mêmes symptômes. Nous le regardons alors s’étaler sur les fesses puis le dos avec les yeux virant au blanc. J’accours donc vers lui pour lui administrer de bonnes gifles. Le grand solide nous répond par : « C’est bon je suis conscient!!! ». Il reprend ses esprits assez rapidement, se relève frais comme un gardon, prêt à encaisser les 80 kilomètres restant. »
Les rencontres que nous effectuons sont chaleureuses et inattendues. Les Grey Nomads, ces retraités qui peuplent les routes du pays avec leur caravanes, s’arrêtent régulièrement pour nous demander si tout va bien, si nous avons besoin d’eau, et certains vont même jusqu’à nous donner un peu de leur aliments. Et puis il y a les autres, les cinglés de la route, ceux qui nous émerveillent par leur courage et leur ténacité. Nous croisons une demi-douzaine de cyclistes, dont notamment deux grands-pères venant d’Alaska, 76 et 78 ans, qui traversent le Nullarbor pour la troisième fois, et qui se moquent gentiment de nous en voyant l’énorme quantité d’eau et de bagages que nous avons. Respect ! Au détour d’un buisson, nous apercevons un attelage de deux chevaux reliés à une roulotte sur laquelle est assise Rattle. L’énergumène s’est mis en tête de faire le tour de l’Australie avec son chariot en 3 ans (cf. rattlesride.com.au). Il nous raconte sa chevauchée fantastique autour d’un carré de chocolat et de bières fraîches sous le soleil de plomb de la plaine quasi désertique. Improbable !!
Le soir du onzième jour nous rejoignons la localité de Ceduna, extrémité orientale du Nullarbor. Un sentiment de béatitude nous envahi. Nous avons du mal à réaliser l’ampleur de la traversée. Nous sommes passés. Incroyable ! Alors que le crépuscule tombe sur l’horizon, la tente enfin plantée sur un coin d’herbe moelleux, nous revivons ensemble ces rudes journées autour d’un festin gargantuesque bien mérité.
Traversée de l’Australie du Sud.
Après une grosse nuit de sommeil, nous reprenons encore la route. Nous faisons de petites étapes de cinquante kilomètres pour récupérer, et les sessions plages s’enchaînent l’après-midi. Nous traversons la péninsule de l’Eyre en quelques jours avant de rouler sur les contreforts des Flinders Ranges. Lorsque nous nous arrêtons chez Paul, cela fait un peu plus de 25 jours que nous n’avons pas pris de pause. Notre sympathique et délirant hôte nous offrent avec plaisir une grasse matinée, qui est plus que la bienvenue. Nous profitons de cette étape pour faire de la maintenance. Le compteur vient tout juste de passer les vingt mille kilomètres et nos montures sont tout aussi éreintés que nous. Gooby, qui ne pouvait plus utiliser le deuxième plateau depuis des semaines, change toute sa transmission : cassette avant, arrière, chaîne et pédalier. Son vélo est presque comme neuf.
Les villes sont plus nombreuses aux alentours d’Adélaïde, la capitale de l’état. La population aussi, et nous sommes gracieusement hébergés certains soirs par des gens fantastiques. Contre seulement quelques anecdotes, ils nous offrent le gîte et le couvert avec une générosité sans pareille. Quel bonheur de se coucher dans un lit ou de profiter d’une douche chaude et d’un bon repas. Même malgré notre énorme appétit qui les laissent pantois, nos hôtes ne se lassent pas d’écouter nos fantasques histoires. Il est difficile d’exprimer toute la gratitude que nous pouvons ressentir pour ces personnes.Nous roulons à travers de belles régions viticoles vallonnées. Le Riesling et le Shiraz produient ici sont d’excellentes factures et nos papilles sont ravies de déguster à nouveau un si doux nectar. C’est d’une des rares choses qui nous manquent parfois sur la route : un bon rouquin et un bon fromage de chez nous ! Nous passons un très bon WE sur Adélaïde avec Paul et Sarah, qui nous font découvrir les environs, avant de remonter sur la selle. Dans les collines à l’est de la ville, tandis que Coco et le petit Thomas se dispute le maillot à pois, Gooby aperçoit, au détour d’un virage, une boule de poil sur un arbre. Le flegmatique koala est pépère, perché sur sa branche et le dévisage d’un air nonchalant, comme s’il disait : « Mais qu’est ce tu fais avec tout ces bagages sur ton vélo…T’es pas malade ! »
Un arrêt au bord de la Murray River et nous jouons les acrobates dans les branches d’un immense arbre avant de se jeter dans le tranquille cours d’eau ;
Un arrêt à Kingston et, à cause d’une petite tempête, nous finissons par dormir sur le revêtement souple dans un jardin d’enfant, abrités de la pluie ;
Un arrêt à Beachport et nous tentons de récupèrer la beuchigue lancée dans les déferlantes d’une plage magnifique ;
Un arrêt à Narrawong et nous passons au barbecue 1,8Kg de saucisse, offre du jour à l’épicerie du coin ;
Un arrêt à Warrnambool et nous sommes hébergés au pied levé par Suzie et son désopilant et hilarant mari Mickael.
Les journées de vélos sont bien remplies et nos soirées mémorables.
Le Victoria et la Great Ocean Road.
Depuis deux mois que nous sommes en Australie, nombreuses sont les personnes nous parlant de cette fameuse route : la Great Ocean Road. Environs trois cent kilomètres d’asphalte qui longent la côte avant Melbourne et possèdent d’innombrables et ravissantes criques et falaises. Le spectacle est à couper le souffle. Inoui point de vue du haut de la montagne après Lavers Hill ; Magnifiques plages à Apollo Bay ; Colonie de Koala observée près de Kennet River ; Les Twelve Apostles, rochers ahurissants surgissant de la mer. Nous passons à Bells Beach, plage mythique des surfeurs australiens et constatons, en voyant les énormes rouleaux qui avalent les planchistes, que finalement, sur notre petite selle, nous ne sommes pas si mal lotis. Nous nous rapprochons de Melbourne et sommes reçus à plusieurs reprises par des cyclo-touristes rentrés au pays. Nous prenons le ferry pour éviter la grande cité et roulons à travers le vert Gippsland.Un midi, nous déjeunons devant une partie de Football Australien disputé par deux localités du coin. Le stade est ovale et immense. Les 18 joueurs de chaque équipe, gaillards, massifs mais néanmoins athlétiques, courent dans tout les sens à la poursuite de la beuchigue. Ils se bousculent, se castagnent, et surtout tapent des grandes quilles à tout va à travers le terrain pour se rapprocher des quatres poteaux qui permettent de scorer. Un local nous explique les règles tandis que nous passons l’après-midi à regarder le match de ce sport cousin du rugby.
Nous fêtons notre anniversaire ce soir-là : un an que nous sommes sur la route. Autour d’un petit cubi de l’amitié, tandis qu’une vache meugle dans le pré voisin, nous revenons sur les péripéties vécues, les gens hallucinants que nous avons rencontrés et les moments durs que nous avons traversés. Lorsque nous reprenons la route le lendemain, avec le casque de chantier réglementaire, nous pensons à toutes ces aventures qui nous attendent encore. Le voyage ne fait que commencer.
Quelques jours plus tard, les ennuis font une nouvelle apparition. Encore une fois, c’est Coco, paratonnerre international, qui récolte la foudre : sa roue arrière est H.S. et le cadre se fissure. Heureusement, nous tombons sur un compétent magasin de vélo à Moe, qui nous sort de l’embarras en deux coups de cuillère à peau. Cadre ressoudé et nouvelle roue, nous repartons vers l’est.L’automne commence à se faire sentir et la pluie finit par nous rattraper. Une journée, nous essuyons une terrible averse et c’est détrempé que nous arrivons, à la tombée de la nuit, dans un hameau perdu au milieu des collines. Là, nous sommes encore une fois émerveillés par l’hospitalité et la générosité des gens. Les habitants nous ouvrent la salle communale et, après nous avoir servi une bonne tasse de thé, nous permettent de passer la nuit au sec. Une douche sous la gouttière débordante et nous étendons nos affaires humides à travers la pièce. Nous nous glissons dans nos duvets, exténués, et finissons par nous endormir à même le parquet.
Nouvelle Galles du Sud et arrivée à Sydney
Nous ne sommes plus qu’à cinq cent kilomètres de notre objectif. Nous roulons encore un peu à travers les collines et la forêt humide, où nous apercevons nos derniers echidnas, mignonnes et timides bêtes que l’on pourrait confondre avec des hérissons gavés aux protéines!
Une ultime journée de vélo nous emmène sur le Sea Cliff Bridge, où la vue est tout simplement bluffante, et à travers le très ancien Parc National situé au sud de Sydney. Capitale économique du pays, la cité compte dans les quatre millions d’habitants, est très étendue et reste vraiment spacieuse. Lorsque nous entrons en ville par le ferry, il nous reste encore 40 kilomètres à parcourir avant de rejoindre Bondi Beach, une des plages les plus mythiques d’Australie. Nous sommes hébergés par Nico puis Thomas et Julie, que nous remercions une nouvelle fois ici pour leur hospitalité. Nous profitons de ces quelques jours pour faire le plein des batteries et chacun prend un peu de temps pour lui. Gooby s’isole tandis que Thomas et Clément vont observer le magnifique opéra depuis le pont qui enjambe le fleuve. Nous flânons en ville, retrouvons nos amis Kiki et Audrey, eux aussi en visite dans le coin, autour d’un houblon bien frais.
Puis vient le temps pour nous de boucler une nouvelle fois nos valises. Notre avion pour la Nouvelle-Zélande décolle le lendemain et, alors que nous démontons les vélos pour les glisser dans leur cartons, nous découvrons un dernier écueil. Le Cannondale en aluminium de Coco, à l’endroit exact que nous avions fait ressouder il y a quelques semaines, est cette fois complètement déchiré. Le vélo est inutilisable. Malédiction! L’âme en peine, Clément, qui tenait énormément à sa monture, doit se résoudre à casser la tirelire pour acheter un nouveau cadre. Mais en trouver un de bonne qualité n’est pas chose évidente, car il faut dans la plupart des cas le commander par internet, et les délais sont parfois conséquent. Comment allons nous réussir à nous sortir de ce nouveau guêpier ? Gardons cela pour notre prochaine aventure au pays des kiwis…
BIG on mai 5, 2014 at 12:34 said:
bravo, super condensé de 3 mois d’escapade, vraiment ça n’a pas du être de tout repos! vous êtes beaux !
Mathieu on mai 5, 2014 at 1:05 said:
Merci de nous faire partager tt ça!!!
chris milon on mai 6, 2014 at 9:09 said:
Ma gni fi que les garcons,admirative devant votre periple,que de choses a raconter au retour.
Un clin d oeil de VO.
gégé on mai 6, 2014 at 7:33 said:
Toujours aussi génial de lire vos récit!!!
Vous etes bons messieurs…la bise
Sarraude on mai 7, 2014 at 8:14 said:
Passionnant!!
Je dévore vos écrits !!!! Vraiment chapeau!!
Bon courage chez les maori!!!
En prime un haka bordelais serait le bienvenue.
Michèle Alain on mai 8, 2014 at 7:56 said:
On continue à suivre les étapes de votre périple. C’est du costaud ! Chapeau ! Bisous du Nord (de la France).
Nadege on mai 14, 2014 at 9:35 said:
toujours aussi passionnant…ça nous fait rever !!! bon courage.bises
Ju et Matthieu on mai 27, 2014 at 10:40 said:
On pense fort à vous les copains !
A bientôt pour de nouvelles aventures !
M@rc35 on juin 10, 2014 at 10:31 said:
Formidable ! (pas fort minable hein !) Continuez !
maya on août 1, 2014 at 11:40 said:
toujours aussi magiques vos récits les garçons!!